Extrait 1 :

     Lola est venue avec « [s]on petit chat, Emo, deux mois. Il est un peu malade, je l’ai pris avec moi ». Emo est dans une sorte d’habitacle en textiles combinés, dont certains sont probablement censés le protéger du monde extérieur, d’autres laisser entrer la lumière. Sauf que le monde extérieur comporte des chiens qui passent près du banc, des odeurs de chiens, des bruits de chiens, et les bruits et les odeurs aussi, ils entrent sans peine dans l’habitacle… pas seulement la lumière. Et ça, ça fait trembler le petit Emo. De peur. Surtout qu’on a posé l’habitacle au bout du banc, après Léo. Ils auraient pu penser à le mettre entre eux ! Ça l’aurait un peu rassurée, cette pauvre bête. Ou même sur les genoux de Lola. Mais, sur ses genoux, Lola, au lieu de tenir le sac du chat, tient en main une sorte de fascicule, de livret, avec la reliure à spirale qu’on utilise habituellement pour des photocopies. Format A4. Sans le regarder, parce qu’elle écoute Théo, elle le tient fermement sous ses mains, posé à plat sur ses genoux, et fait glisser machinalement son pouce sur le lisse de la couverture en plastique transparent.


Extrait 2 :

     Lola a pris le livret à deux mains et s’apprête à le lire. Elle a tourné la couverture de plastique transparent, longtemps caressée par son doigt sans en garder d’autre trace qu’un vague flou à peine gras… et d’ailleurs cela ne sert à rien pour lire le titre, de tourner cette couverture, puisque le plastique transparent… est justement transparent. Mais les choses sont ainsi… Dans la vie, on a des réflexes… Léo attend impatiemment que résonne la voix de Lola qui va lire, à voix haute, le titre. Et puis tout le reste. Là, sur ce banc, dans le parc, au milieu des bruits du parc, qui ne sont pas vraiment gênants, mais un peu quand même, Lola va prononcer le titre, que Léo connaît déjà depuis plusieurs jours. Et d’ailleurs Lola le connaît aussi depuis un bon moment, le titre du scénar, puisqu’elle a eu le temps et l’occasion de le voir et de le revoir à travers la transparence de la couverture de plastique et entre les mouvement de caresse machinale de son doigt.


Extrait 3 :

21 – AU BORD DE LA ROUTE – EXT. JOUR

Alena et Olivier descendent du véhicule, pour échanger leurs places. Le Velorex de Jaroslav fait halte une cinquantaine de mètres en amont. Olivier le voit.

 OLIVIER

Mais il veut quoi à la fin ce type ?

ALENA (d’un air très tranquille, avec un léger sourire)

Tu crois aux fantômes ? (Mine incrédule et interrogatrice d’Olivier). Ne me dis pas que tu ne l’as pas reconnu (1)… (Sur un ton de plaisanterie ) A force de penser très fort, volontairement ou non, à certaines personnes, je crois qu’elles ont le pouvoir de nous hanter, hi hi hi ! (D’un air songeur et ému) Je crois souvent revoir mon père… (Plaisantant) Celui-ci, c’est sûr : c’est toi qui dois l’attirer !

Ils redémarrent, de même que Jaroslav.

22 – A BORD DU VELOREX D’ALENA ET OLIVIER – EXT. JOUR

Une sonnerie de téléphone, différente de celle d’Alena. Olivier retire l’appareil d’une de ses poches.

OLIVIER

Allo ?... Oui papa… On est en route là… Non, ne n’est pas moi qui conduis… Ma copine, oui… Alena, papa, elle s’appelle Alena… Oui, je vous la présenterai…


 

(1) Le scénario a déjà précisé que ce Jaroslav ressemble étrangement à Léon Trotski.

 


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